L’OL [MAG] a organisé une enquête exclusive auprès des opticiens* pour sonder leur opinion et leurs pratiques en matière de formation.

Résultats des courses : les formations post-BTS (notamment la licence) gagnent du terrain, la formation continue est plébiscitée mais se heurte encore à divers obstacles.

Le BTS en 3 ans apparaît comme une nécessité. Quant à l’obligation de DPC, elle est bien souvent superbement ignorée.

28% des sondés ont la licence ou le master

Sans surprise, le plus haut diplôme professionnel de la majorité des répondants (61,4%) est le BTS Optique-Lunetterie. Ils sont cependant presque 28% à être allés plus loin : 14,5% ont comme plus haut diplôme la licence professionnelle d’optique et 13,3% possèdent le master Sciences de la vision. Si cette proportion est sensiblement la même quel que soit le statut (propriétaire ou salarié), elle varie selon la tranche d’âge, avec une propension sensible des plus jeunes à aller au-delà du BTS : en effet, 28% des moins de 30 ans sont titulaires de la licence (10,6% ont le master).

Les CQP, encore peu répandus

Seulement 10,5% des professionnels sondés ont ou sont inscrits à un CQP (Certificat de qualification professionnelle) : pour la moitié d’entre eux, il s’agit du CQP Technique et pour l’autre moitié du CQP Commerce. Pour rappel, lors de la session 2014, les CQP ont enregistré 54 lauréats. Notons par ailleurs qu’à peine 1,1% des répondants à notre enquête ont le Bachelor de manager en optique (formation post-BTS en 1 an de niveau bac +3 créé par l’Institut supérieur d’optique en 2011).

La formation continue, indispensable pour 3 opticiens sur 4

L’intérêt de la formation continue n’a plus à être démontrée : pour 74% des sondés, elle est tout bonnement IN-DIS-PEN-SABLE. Un petit quart (24%) la juge accessoire et seule une infime minorité (1,9%) l’estime inutile. Il est intéressant de noter que les plus jeunes sont un peu moins nombreux à être conscients de son importance : elle est jugée “indispensable” par 67,3% des moins de 30 ans, contre 77,5% des plus de 40 ans. Cette différence peut notamment s’expliquer par le fait que les plus jeunes ont terminé leur formation initiale peu de temps auparavant, et ont donc le sentiment que leurs acquis sont davantage en phase avec la réalité actuelle du métier.

L’inquiétante ignorance de la profession sur le DPC

Entré en vigueur en 2012, le Développement Professionnel Continu (DPC) s’impose à l’ensemble des professionnels de santé, y compris aux opticiens. Depuis 2013, tous les opticiens lunetiers, propriétaires et salariés, ont une obligation annuelle de formation et doivent suivre, dans son intégralité, un programme de DPC par an, associant analyse des pratiques professionnelles et acquisition/perfectionnement des connaissances/compétences, dispensé par un organisme enregistré par l’OGDPC et évalué favorablement par une commission scientifique représentant la profession concernée. Notre enquête révèle cependant un important déficit d’information sur le DPC : près de 2/3 des sondés ne savent pas de quoi il s’agit ! Cette lacune est particulièrement importante chez les moins de 30 ans, qui sont 53% à n’en avoir même jamais entendu parler, contre 29% de l’ensemble des sondés ! Et si 38% des répondants savent en quoi cela consiste, seuls 19% d’entre eux ont respecté cette obligation en ayant déjà fait une ou plusieurs formations DPC (21,3% des propriétaires et 14,5% des salariés – 18,7% des opticiens en magasin indépendant mais seulement 9,6% des opticiens en point de vente sous enseigne). Ce résultat ne doit pas être pris à la légère : le DPC est bel et bien une obligation, dont le respect sera contrôlé au moins tous les 5 ans par l’ARS (Agence régionale de santé). Les employeurs doivent être particulièrement vigilants, car ce sont eux qui doivent donner à leurs collaborateurs la possibilité de suivre le DPC et s’assurer du bon suivi des programmes.


Bon point pour les opticiens de plus de 50 ans ! La moitié d’entre eux savent en quoi consiste
le DPC, et 27,5% d’entre eux ont déjà fait au moins une formation dans ce cadre.

La formation continue, une pratique répandue en optique

En toute logique, les opticiens, qui majoritairement jugent « indispensable » la formation continue, sont très nombreux (78%) à y recourir. Mais, pour la moitié d’entre eux (48%), cela n’arrive que « très ponctuellement et/ou irrégulièrement. » 30% des sondés (35% des propriétaires) suivent une formation régulièrement, au moins une fois par an quand, à l’inverse, 22% n’en suivent jamais (16,5% des propriétaires). Les plus jeunes, moins nombreux à être conscients de l’importance de la formation continue, sont la lanterne rouge : 41% d’entre eux ne suivent jamais de formation et seuls 14,3% d’entre eux en suivent au moins une fois par an.

Des thématiques variées, et qui valent le coup !

Quand ils choisissent des formations continues, les opticiens ne focalisent pas sur un domaine précis : 62,3% d’entre eux souhaitent se perfectionner sur tous les aspects du métier et déclarent suivre tantôt des modules orientés technique/santé visuelle, tantôt des modules orientés vente/commerce/gestion. Ceux qui privilégient une facette optent surtout pour le côté “médical” : 32,5% des répondants choisissent surtout des formations technique / santé (18% de ceux qui travaillent sous enseigne, contre 41% de ceux qui travaillent en point de vente indépendant), quand seulement 5,2% suivent essentiellement des modules à contenu commercial. Notons par ailleurs que la majorité des opticiens (67,5%) ayant déjà suivi des formations les ont estimées «très utiles, avec des résultats quasi immédiats en magasin», quand 31% les ont jugées «intéressantes mais sans plus.»

L’absence en magasin, principal obstacle à la formation continue

Ceux qui ne suivent jamais ou que très ponctuellement des formations continues évoquent comme principale raison la nécessité de s’absenter du magasin (raison principale pour 61% d’entre eux), ce qui peut pénaliser le bon fonctionnement du point de vente. En effet, ceux qui travaillent seul en magasin sont 20% à suivre une formation au moins une fois par an, contre 37% chez ceux qui sont au nombre de 3 et plus dans le point de vente. Le frein financier (« cela coûte trop cher ») n’est cité comme raison principale que par 11,6% des sondés, derrière la complexité des démarches (21,5%).

Le “présentiel” domine encore largement

Pour 79% des sondés ayant déjà suivi ou étant inscrits à des formations continues, le dernier module en date s’est fait ou se fera sous une forme présentielle (avec l’apprenant ou le formateur dans un même lieu). 19,5% évoquent une formation à la fois présentielle et à distance, quand seulement 1% a suivi ou suivra une formation 100% à distance (de type e-learning). Notons que les formations mixtes sont plus couramment utilisées dans les magasins sous enseigne (35,7%), les franchises et coopératives ayant pris le parti de développer ce type de modules à destination de leurs adhérents / associés, afin d’éviter une trop longue absence du collaborateur formé en magasin.

Les patrons impliqués dans la formation de leurs salariés

Pour la moitié des opticiens propriétaires, la formation fait partie intégrante des méthodes de management du magasin : 49% d’entre eux font suivre régulièrement des formations à leurs collaborateurs. Ils sont par ailleurs 35% à leur en faire suivre de temps en temps, notamment quand leurs employés le demandent. La politique de formation est particulièrement soutenue chez les opticiens sous enseigne, qui sont 68% à faire suivre régulièrement des modules aux employés. Notons que, pour la majorité des salariés (65,5%) ayant déjà suivi des formations, celles-ci ont été proposées par le patron. Seuls 17,2% d’entre eux se voient imposer des formations, quand également 17,2% d’entre eux doivent les demander.

Le programme du BTS OL, à revoir !

Pour l’écrasante majorité (94,5%) des sondés, le programme de la formation initiale du BTS OL devrait être réformé : 72%
estiment qu’il est nécessaire de l’améliorer dans le domaine technique / santé visuelle et 22,5% souhaitent le perfectionner dans le domaine commerce / vente /gestion. Ce jugement sévère sur le référentiel actuel du BTS OL est général et s’observe quels que soient le statut, le type de magasin ou l’âge du professionnel.

Le BTS en 3 ans plébiscité

La majorité des opticiens jugeant insuffisant le contenu du BTS OL, il n’est pas surprenant que 79% d’entre eux soient favorables à une formation en 3 ans, y compris les plus jeunes. Quand on leur demande les raisons qui les poussent à soutenir l’idée d’une année supplémentaire, nombreux sont ceux qui évoquent la nécessité d’intégrer le diplôme au dispositif LMD, mais aussi et surtout celle d’améliorer et d’approfondir les connaissances. Parmi les commentaires recueillis, on note : «il faut réintroduire des matières comme le façonnage», «améliorer le niveau en optique et optométrie», «renforcer la partie réfraction et gestion», «c’est 5 ans qu’il faudrait, on se complait dans la médiocrité», «le niveau des jeunes diplômés est désastreux», «il faut passer à 3 ans si on veut prétendre à une délégation de tâches avec les ophtalmologistes», «cela permettrait de diminuer le nombre de diplômés», «il faut être en phase avec un métier de plus en plus complexe en termes technique, commercial, tiers-payant…», «la part commerce a pris trop de place au détriment du côté technique.» Beaucoup d’entre vous plaident également pour «l’introduction d’un stage en milieu hospitalier», «des stages plus longs en magasin» ou encore «une vraie formation en contactologie.»

La formation continue a de l’avenir !

Bénéficiant sans doute des lacunes constatées de la formation initiale, et en attendant sa « réingénieurie », les professionnels misent donc sur la formation continue, qui devrait avoir le vent en poupe dans les prochaines années : 65% des opticiens propriétaires comptent ainsi l’intensifier pour leurs collaborateurs. Les raisons évoquées : « pour toujours chercher à évoluer », « pour rebooster les équipes et redonner confiance », « professionnaliser les collaborateurs et améliorer les performances du magasin », « répondre aux appels d’offres des Ocam », « mieux comprendre l’évolution des produits »… Quant aux 35% qui ne comptent pas modifier leur politique de formation, ils soulignent soit un effort déjà suffisamment soutenu, soit des obstacles tels que le « manque de temps », « la difficulté de gérer les absences en magasin », « la complexité des dossiers » ou encore « un budget limité. »

L’E-learning, pensez-y !

Car, aussi utile et importante que soit la formation, il n’est pas toujours facile de s’absenter du magasin ou de se passer d’un collaborateur pendant 2 ou 3 jours.

C’est d’ailleurs, dans notre enquête, la principale raison évoquée par ceux qui ne suivent jamais ou que très ponctuellement des formations continues. Pour répondre à ces contraintes de temps et de disponibilités, les organismes sont de plus en plus nombreux à proposer des modules e-learning, qui permettent à “l’apprenant” de suivre sa formation à son rythme, mais surtout depuis le magasin, entre deux clients, ou à son domicile et ce, 24h/24 et 7j/7. Développés par certaines enseignes (comme Optic 2000), des fabricants, des centres de formation, des écoles (comme l’ICO) ou des plateformes dédiées (comme Opthome), ces modules (qui peuvent “s’auto-suffire” ou venir en complément d’une formation traditionnelle) ont pour point commun de recréer virtuellement la relation entre le formateur et l’apprenant. Ils ne nécessitent qu’une connexion Internet et un ordinateur (ou une tablette). Les cours sont souvent dispensés par un “professeur virtuel” et assortis de quizz permettant de vérifier ses acquis. Si besoin, un professionnel bien “réel” est bien sûr joignable (souvent par chat) pour répondre aux questions. Outre leur côté pratique, ces dispositifs revêtent une dimension ludique qui “déformalise” l’apprentissage. Le “formé” n’étant pas dans une dynamique de groupe, ils nécessitent cependant une bonne motivation de départ.


* Sondage réalisé en ligne du 8 au 13 janvier 2015. Ont répondu 284 opticiens : 60,2% de propriétaires et 39,8% de salariés ; 64,8% travaillant dans un point de vente indépendant et 35,2% dans un point de vente sous enseigne.