Les réseaux de soins parviennent-ils à résister au 100 % santé ? La réponse de Xerfi
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Le 100 % santé est perçu comme une menace très sérieuse pour les réseaux de soins. La mise en œuvre de la réforme a-t-elle pénalisé leur activité ? Le cabinet Xerfi livre son analyse dans une étude dédiée aux stratégies des plateformes de santé.
En permettant à tous les Français d’acquérir des lunettes, des aides auditives et des prothèses dentaires sans reste à charge, le 100 % santé est susceptible d’ôter un pan de leur légitimité aux réseaux de soins. Très conscientes de ce risque, les plateformes ont bâti une stratégie de défense, intégrant notamment le lancement de services supplémentaires et leur rapprochement au sein d’une association qui a pour objectif de défendre leur intérêt (APFS). Pour évaluer l’impact de la réforme sur ces acteurs du système de soins, Xerfi publie une étude intitulée « Les stratégies des plateformes santé et réseaux de soins dans l’assurance – 100 % santé, généralisation du tiers payant, réarbitrages tarifaires : quelles marges de manœuvre pour réorganiser les parcours de soins ? »
Le cabinet conclut que, pour l’instant, les réseaux de soins « passent haut la main l’épreuve du 100 % santé ». Dans un communiqué présentant quelques conclusions de l’enquête, Xerfi explique que, entre 2018 et 2021, l’effectif moyen du nombre de professionnels de santé conventionnés par les cinq plateformes françaises a bondi de 14 % dans l’optique, de 35 % dans l’audioprothèse et de 21 % en dentaire. « La part des opticiens et audioprothésistes français affiliés a dépassé 65 % en 2020. Quant aux taux de rattachement des acteurs de l’assurance santé aux plateformes, qui rassemblent plus de 50 millions de bénéficiaires (plus de 80 % des assurés santé du territoire), il n’a pas reculé même si des mouvements de portefeuilles ont pu intervenir au gré des mouvements de consolidation. »
La réforme a rééquilibré les rapports de force entre réseaux de soins et professionnels de santé
Pour autant, rien n’est gagné : selon Xerfi, le CA de ces plateformes santé (plus de 60 millions d’euros en 2019) devrait ralentir au rythme de 5 % par an entre 2020 et 2023. « Les possibilités de recrutement de nouveaux clients et bénéficiaires se font plus rares dans l’univers de l’assurance santé. Sans oublier que les marges de manœuvre tarifaires des plateformes sont limitées, sauf à peser sur les coûts finaux des contrats et donc inciter les Ocam à se tourner vers des concurrentes moins onéreuses. En clair, développer de nouvelles prestations sera bien moins facile à l’avenir. Pour renforcer leurs leviers d’action sur les parcours de soins, les opérateurs seront invités à privilégier des schémas moins coûteux en recourant entre autres à des partenariats (enseignes, organisations professionnelles, acteurs de la e-santé…) », analysent les experts. Les rapprochements entre les complémentaires santé peuvent par ailleurs redistribuer les cartes (transferts, révision d’alliances…).
Selon Xerfi, la transformation qu’implique la réforme pour les réseaux de soins repose sur cinq grands axes : peser sur l’offre et les nouveaux parcours de soins 100 % santé, renforcer l’efficacité des soins dans toutes les disciplines, optimiser les taux de recours des assurés aux dispositifs, tirer parti de l’envolée des usages numériques en santé et accompagner la refonte de la prévention santé au travail. Les experts assurent que, malgré l’augmentation globale de la taille des réseaux, le 100 % santé a rééquilibré leurs rapports de forces avec professionnels de santé. « Les plateformes n’ont désormais pas d’autre choix que de s’immiscer plus directement dans le parcours de soins des assurés. Si les logiques d’orientation sont déjà une composante essentielle de leurs modèles d’affaires, elles prennent aujourd’hui une nouvelle dimension autour des outils d’autodiagnostic, de la télémédecine et des prestations de prévention en entreprise. Sauf qu’elles ne sont pas les seules à prétendre piloter les parcours de santé (enseignes de professionnels de santé, plateformes d’intermédiation, pouvoirs publics ou encore Ocam) ». Pour Xerfi, la qualité de pilotage des parcours se jouera de plus en plus autour des compétences data. Les réseaux « devront donc sécuriser leurs sources de données tout en s’ouvrant à de nouveaux partenaires dotés de compétences complémentaires. A ce titre, le tiers payant (qui sera généralisé en 2022 au moins pour les produits 100 % santé, ndlr) est au cœur d’une nouvelle bataille », affirme l’étude.